Les Promesses de l'Ombre, réalisé par David Cronenberg, avec Naomi Watts, Viggo Mortensen, Vincent Cassel, Armin Mueller-Stahl (1h40)
Synopsis
Anna, sage-femme londonienne, récupère le journal d'une adolescente russe décédée lors d'un accouchement. Afin de retrouver le père de l'enfant, Anna fait traduire le journal par son oncle Stepan. Grâce à quelques indices, elle se rend dans un restaurant russe où elle rencontre Semyon, le patron, qui propose de traduire le journal. Ce qu'Anna ignore, c'est que Semyon et le journal sont étroitement liés...
La critique de Powell
Deux ans après l'excellent A History of Violence, David Cronenberg retrouve Viggo Mortensen et signe un thriller comme on aimerait en voir plus. Si le film a une apparence de film noir hollywoodien classique, il n'en est rien. Habitué des scénarios complexes, le réalisateur s'en écarte et livre un film percutant. Tout est clair dans ce film, limpide, chaque scène sert l'histoire (certains y verront une progression dans le style d'un réalisateur qui part le passé a pu se perdre dans des scènes parfois dispensables), la mise en scène est chirurgicale, fulgurante. Pas d'esbroufes dans ces Promesses de l'Ombre.
Thriller efficace, certes, mais plus encore. David Cronenberg ne filme pas une simple histoire. Il filme des acteurs, trois acteurs magnifiques. Vincent Cassel (qui en fait des tonnes, magnifique fils dépassé, alcoolique), Naomi Watt (dans son meilleur rôle depuis Mulholand Drive) et surtout, Viggo Mortensen. Ce dernier captive, dérange. Sa présence magnétique pourrait suffire à la réussite du film. Il est l'objet du cinéaste. En effet, depuis ses débuts au cinéma, David Cronenberg n'a eu de cesse d'explorer un thème précis, celui de la transformation, la mutation des corps et des êtres, que ce soit psychique (Chromosome 3, Le Festin Nu), ou encore physique (Crash, A History of Violence). Les Promesses de l'Ombre ne déroge pas à la règle, sauf qu'ici, seul Viggo Mortensen se transforme. Son corps change sous les tatouages. Et lui même change, de dominé à dominant, d'homme à animal, dans une scène où la bestialité atteint son summum. David Cronenberg filme ses personnages à travers un Londres pluvieux. Tous ne sont que des marionnettes .
Là ou ce film se démarque du reste de la filmographie du réalisateur, c'est qu'il ne cherche pas à perdre le spectateur, ni à l'intriguer. Cronenberg n'est plus manipulateur du spectateur. Il se contente de montrer des personnages, évitant de tomber dans la fascination pour ses acteurs. Il reste froid, créant une distance glaciale entre acteurs, réalisateur et spectateur (distance nécessaire tant certaines scènes peuvent être dures voire insoutenables). Mais ce n'est qu'à la toute fin du film que le génie de Cronenberg nous apparaît. C'est une fausse happy-end cachant une profonde nostalgie. Un bébé sauvé des eaux, un baiser échangé par deux personnes qui ne se reverront jamais. C'est l'opposition entre deux mondes, entre deux Londres, celui de Naomi Watt, honnête sage-femme, mère aimante, et celui de Viggo Mortensen, assis à une table du restaurant russe, à jamais marqué, le regard dans le vide, hésitant entre devoir et pouvoir. Une fin qui laisse goût amer.
Les Promesses de l'Ombre est un très grand film, un thriller qui marque un renouveau dans la filmographie du cinéaste, tout en continuant d'explorer les thèmes qui lui sont chers.
Les Promesses de l'Ombre est un très grand film, un thriller qui marque un renouveau dans la filmographie du cinéaste, tout en continuant d'explorer les thèmes qui lui sont chers.
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